13 octobre. Dénivelé, +755m et - 575m. Temps, 4h30.
Réveil vers 7h. Il ne fait pas très chaud mais le ciel promet une belle journée. Il nous faut une bonne heure pour s'enfiler un café et plier bagage. Chacun s'affaire à ses préparatifs et les sacs sont bouclés vers 9 heures.
Lente montée dans le vallon en direction du NNE, au-dessus des derniers abris. Le givre s'est déposé sur les touffes de végétation... Il parait qu'il fait 35° à Marrakech ! On réussit à récupérer le sentier "aux poissons rouges" qui nous mène à un col vers 2690m. Mais la vue au-delà ne correspond pas trop à ce qu'il y a sur notre carte. Peut-être étions nous dans un hameau situé au nord d'Azib Tiznoute et non indiqué sur la carte ? Mais il n'y a pas trop de questions à se poser ! Il n'y a qu'à suivre le sentier qui monte gaillardement vers le Tizi Imchichki où on fait une pause casse croute. Superbes vues de tous côtés. Un déferlement de vagues minérales monte à l'assaut du Toubkal qui en émerge tout de blanc vêtu. Nous, on surfe là-dessus et on a enfin la vue sur la vallée de l'Oufra. Théo n'y croit pas encore...
Descente bien tracée dans les éboulis qui nous mènent à une bergerie récemment abandonnée par ses occupants. Installée au bord de l'Oufra, elle est tout simplement magique. Entourée de genévriers millénaires, elle semble veiller sur ce coude de la vallée. Impossible d'aller plus loin ! Ce serait criminel de laisser passer un tel coin de bivouac. Cet endroit a quelque chose de biblique et d'intemporel. Il s'en dégage une telle impression de sérénité... Il y en a pourtant des randonneurs qui y ont sacrifié des ordures. Mais qu'est ce qu'ils ont dans la tête ces gens qui ont abandonné là leur déchets ! Il n'est pas encore 13h mais on pose les sacs tout en enchaînant sur le thé rituel.
Il est 14h10... j'écris assis sur un beau rocher au milieu du torrent. Derrière moi, ça se lave, ça fait une petite lessive, ça rêve. Errer au milieu de la bergerie est un vrai régal et l'appareil photo crépite de tous côtés. Les abris sont constitués d'un savant mélange de pierres et de bois. Un esthétisme rare se dégage de ces murs. Les bergers qui y habitent les voient-ils ainsi ? Et les jeunes marocains de retour du 93 comme ils disent, qu'en pensent-ils ?
Un jeune berger est passé près des tentes avec son troupeau. Il semblait bien intéressé par les chaussures de Philippe... Le soleil a disparu derrière les crêtes et la fraîcheur gagne. Soupe, polenta et chacun se replie dans la tente pour un tour complet du cadran, de 19h à 7h !
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14 octobre.
Dénivelé, +525m et - 1695m. Temps, 9h30 Le réveil est frisquet, ce matin. On se boit les deux derniers cafés et du thé. Des nuages noirs et menaçants occupent le ciel vers l'est. On plie le camp et vers 8h45, on entame la descente le long de l'Oufra.
Le chemin est bien marqué et les "petits poissons rouges" se voient de loin. La vallée se fait un peu plus sinueuse. Le versant gauche est toujours recouvert de ces arbres millénaires aux ramures impossibles. On longe un petit enclos, on traverse sur un pont de bois et cailloux pour arriver à un abri de berger, construction circulaire en pierre. L'intérieur est garni de paille fraîche, un foyer est situé près de l'entrée.
La vallée se resserre encore en un verrou occupé par un nouveau village de berger. Ici aussi, la pierre et le bois se marient, s'entrelacent en un improbable tissage. Autant le village d'hier soir était ouvert et accueillant, celui-ci est austère, fermé et presque inhospitalier. Les murets et les barrières sont impénétrables. De véritables murailles hérissées de troncs blanchis par le soleil, gardent jalousement des constructions dont on ne voit pas grand chose. Quel est l'artiste qui a conçu cette œuvre ? En Europe, on parlerait de land-art et on s'extasierait devant. Mais il ne s'agit pas de l'œuvre d'un artiste fou ou génial... C'est le résultat de gestes venus du fond des âges et c'est stupéfiant d'harmonie.
On continue à descendre la vallée. Le chemin circule à mi pente et domine le fond verdoyant. Verdoyant car l'eau est présente partout au fond de la vallée. Et quand elle manque, de petits canaux la transportent sur de grandes longueurs.
On approche d'un village, Amzel, le premier depuis longtemps. Enfin, depuis deux ou trois jours seulement, mais ça semble être une éternité ! C'est l'heure où les gens vont travailler aux champs. On croise des filles conduisant une ou deux vaches, quelques moutons... une petite gamine haute comme trois pommes avec serpette et pioche... on doit être des extra-terrestres pour elle !
Traversée d'Amzel puis longue descente et ça remonte et ça redescend... ça n'en finit pas et Théo termine en zombie avec de fréquentes nausées.
Le chemin devient très aérien à l'approche d'un nouveau village. Soudain, on tombe nez à nez avec une grosse pelle Poclain entrain de tailler la montagne pour tracer sa route. On pourra bientôt monter ici en voiture... les convois de mulets qu'on croise sont peut-être les derniers à emprunter ces pistes.
La dernière descente nous emmène au bord de la rivière. Il ne reste plus qu'à la suivre jusque Setti Fatma. Ce dernier tronçon est un peu aquatique. Marre de chercher des gués pour passer d'une rive à l'autre... une fois qu'on a les pieds mouillés, on n'hésite plus !
Et voilà... tout se termine à l'hôtel Asgaour, à côté du bureau des guides. Le Toubkal n'a pas voulu de nous. La glace et la neige nous auraient, de toutes façons, posé problème. Mais je vais revenir. Même si ce n'est pas pour le Toubkal, les vallées de l'Atlas me plaisent bien !
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