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Aux sources de l'Isortoq

Groenland 1996

(24 juillet au 25 aout)

Bernard Brighi
Denis Jacquemot

 

23 jours en autonomie pour joindre les sources de l'Isortoq et retour sur Ammassivik. 8 jours de portage seront nécessaires pour arriver aux sources où on établira le camp 5. On y restera 6 jours et deux sommets seront gravis. Le retour sur Ammassivik se fera en 9 jours par la vallée de Henrik Lundip, au bord de laquelle on fera un sommet.

 

 

Lundi 29 juillet.

Le petit déjeuner se termine sous le soleil, à côté de la tente plantée sur les hauteurs de Qaqortoq.

Quatre jours passés en transit à voir passer des avions, des bateaux, des gens, des lieux, des icebergs, une aurore boréale, des nuages, de la pluie... Une escale rapide à Copenhague puis à Sondre dans un aéroport bondé et bruyant. Le survol de la côte ouest du Groenland se fait au-dessus des nuages. Juste une éclaircie en arrivant sur Narsarssuaq où on a le temps d'apercevoir, à travers les hublots, le sommet du 2200 de l'année dernière. Deux nuits au camping de Narsarssuaq puis le bateau jusque Qaqortoq. L'express côtier, le Tatérak, dessert tous les villages et l'ambiance y est au papotage... je me souviens de Karen Marie et sa mère, Bolette.

 

 

Arrivée à Qaqortoq vers 23h30 et il fait nuit. On erre un peu avant de trouver un emplacement pour notre tente, près du terrain de foot. Il est alors 1h du matin et une aurore boréale tire son trait au-dessus de nous.

 

 

On va passer deux jours à Qaqortoq avec de longues stations à l'Artic Café. Le temps est souvent à la pluie et le café nous offre un abri bien douillet. Déjà 5 jours qu'on a quitté Paris et le temps s'écoule lentement. Tous ces villages groenlandais qu'on a entraperçus depuis le bateau avec cette impression de déjà vu ; tout cela donne un étrange mélange d'immobilité et de mouvements, comme si le temps et la vision n'étaient plus en phase !

 

 

Mardi, 30 juillet.

Ce matin, lever vers 6h, démontage du camp et direction le port où le Tatérak est resté à quai depuis la veille. Beaucoup de jeunes à bord, c'est la fin des vacances pour eux !

 

 

On y croise un groupe de français de Nouvelles frontières. A la deuxième escale, tous les jeunes descendent. Ils sont accueillis par deux porte-drapeaux... Il y a foule sur le quai puis il se vide très rapidement, comme par enchantement.

 

 

Le Tatérak charge quelques caisses de bière et c'est reparti ! La prochaine halte sera pour nous. Les baleines au loin font de rapides apparitions. A un moment, le bateau n'hésite pas à piquer droit sur un iceberg où un phoque placide nous regarde passer sans bouger bien qu'un marin ait sorti son fusil.

 

 

Ammassivik... On est les seuls à descendre du bateau ! Ouahou !! Où est-ce qu'on est ? ça c'est le Groenland comme je l'aime : un petit quai où quelques poissons trainent dans des casiers et sur les tables de découpe, quelques maisons isolées, quelques groenlandais désœuvrés venus regarder arriver le bateau hebdomadaire, quelques chiens et la grande lumière au-dessus de tout ça !!

 

 

Rapidement, on trouve un pêcheur prêt à nous emmener au fond du fjord de Sioralik, là où les icebergs viennent mourir. Il nous débarque, nous et nos gros sacs et repart en nous faisant un dernier signe... sans rien nous avoir demandé de notre destination alors qu'on est au bout du monde, comme s'il n'y avait rien de plus normal que de nous laisser là alors qu'il n'y a plus rien devant nous... On est entièrement livré à nous même pour 23 jours !

 

 

Deux petites heures de marche pour remonter le fond du fjord au milieu d'une végétation dense de saules nains et de mouchettes. On installe le camp 1 sur un promontoire où se dessine le début de la vallée de l'Isortoq : une entaille dans la montagne !