Le sentier européen E5

de l'Atlantique à l'Adriatique


Etape 21

Jeudi 2 juillet

De la Fontaine de San Fermo (Mt Durer) au Massif du Pasubio

 

Dpt 6h30 fin 16h10 total 8h40

Asc 1290m Dsc 735m

 Lever 5h15, un peu mal réveillé… c’est un peu tôt ! Le ciel est déjà voilé… je ne sais pas ce que ça prépare. Hier soir, quelques gouttes sont tombées et un orage a éclaté « sur une lointaine mesa ».

Hier, j’ai eu fin nez d’aller faire une reco pour me mettre sur le bon chemin : ça m’a semblé plus facile ce matin, je savais où j’allais.

Belle montée d’escaliers pour arriver au Lazaret (ancien hôpital).

Le chemin serpente en montant dans une belle forêt de sapins. Mais il a l’air peu emprunté et y a intérêt à surveiller de près le marquage sur les arbres. Sortie de la forêt au milieu des alpages avec une vue superbe sur des sommets enneigés, lointains et inconnus.

Arrivée sur la crête (1735m) : on aperçoit la croix du Mont Maggio et la descente qui n’est pas si terrible que ça vers la petite station de ski de fond de Coe Pao. Le premier bar n’ouvre qu’à 11h30… et je dois être le premier client du deuxième où je prends un café et une part de tarte.

 

 

Direction Monte Maggio et sa putain de route de guerre qui n’en finit pas. Mais le résultat est superbe au niveau de la vue. Deux dames sont assises au pied de la croix et je pique nique en contrebas.

Belles tranchées taillées dans la roche :

 

 

La vue est superbe et le chemin qui mène à la Borcoletto vaut le détour : chemin en vire taillé dans la roche avec vue plongeante sur des vallons où des tourelles de pierre font des pieds de nez aux sapins.

Très longue descente qui n’en finit pas jusqu’à Borcolo Pass où je pense m’arrêter pour aujourd’hui. Un peu avant le col, les premières gouttes tombent… et j’arrive sur un espèce de col paumé avec juste une aire de pique nique au bord de la route et des bouses de vache partout. Et moi qui pensais en plus y trouver de l’eau : ma réserve est pauvre, à peine 1 litre.

Je le sens très mal ce camp 21 !! Hors de question de continuer sans eau, il parait que la suite est sèche et ça monte très sévère jusqu’au prochain refuge qui est à 5h30 de marche et j’en ai plein les bottes.

 


Il pèse le bougre ! Mais je l'aime bien quand même.

 

Je ne sais pas trop quoi faire… sous le col, il y a l’air d’avoir une ferme qui fait buvette en même temps. Je reprends mon sac et j’y descends. Je ne vois qu’une seule solution : trouver de l’eau à tout prix et attaquer la montée en comptant sur la chance pour trouver un endroit à tente. Combien de fois j’ai pu tester « y a un dieu pour les randonneurs » ? C’est le moment d’y croire !

Je m’enfile 2 cocas à la buvette tenue par une jeune aux cheveux gras et une toute vieille qui s’enfile une grappa. Deux vieux jouent aux cartes et ça sent bon le feu de bois… ambiance et le ciel tout noir qui gronde et laisse tomber quelques gouttes ! Mais qu’est ce que je fais là ? Pas bien !!

Ils n’ont pas d’eau potable au robinet !!! Mais bien sûr, elle me vend des petites bouteilles d’eau : 6 euros pour 2 cocas et 3 bouteilles … elle a du se tromper avec sa grosse machine à calculer…

Bon ! J’attaque la montée tout cool et je me fais doubler par… une moto ! Incroyable !

Première bonne surprise : une petite fontaine sur le bord du chemin, mais c’est un goutte à goutte qui tombe. Plus haut, juste au-dessus du niveau des arbres, deuxième point d’eau et ce coup ci, c’est un vrai petit filet qui coule. Faut que je trouve un coin plat par ici.

 


Elle coule pas fort mais elle vaut des milliards !

 

Un tout petit peu plus loin, c’est le miracle ! Quelques terrasses dominent la vallée, des rhodos, des orchidées, une vue d’enfer… j’avais raison d’y croire.

Des ouvrages militaires, la vue sur la descente de Borcoletto et même un chamois qui ne me voit pas et que je regarde brouter, accroché à une vire.

19h52, j’ai fini de manger. Un petit café. Du brouillard monte de la vallée puis disparait. Un autre revient, le baromètre qui joue du yoyo. Maintenant, le ciel a l’air de se dégager… tout change très vite.

Je crois que, si j’y arrive, je vais me payer une petite grasse mat demain matin  ! 20h30, au lit.

 


Camp 21... le bonheur !

Etape 22

Lundi 15 juin

Du massif du Pasubio au Monte Cornetto

 

 

Dpt 8h20 fin 16h30 total 8h10

Asc 755m Dsc 1035m

 Super grasse mat… lever à 6h30 !! Mais bon, d’habitude à cette heure là, je marche déjà !

Petit dèj au soleil avec deux chamois qui rodent dans le coin. Je prends mon temps, il fait bon.

Agréables, ces grimpettes du matin qu’on attaque lentement : le poids du sac n’en est pas encore à être chiant, les bâtons rythment la marche et on s’élève pas après pas, tout en rêvant. Et, quand on se retourne, on est surpris du chemin dé jà parcouru.

Tranchées, casemates creusées dans la roche… ça a bataillé dur dans le coin. La Corne de Pasubio a l’air d’avoir été le théâtre d’âpres combats, comme on dit.

 


Reste des combats du Mont Pasubio

 

Croisement de chemins : variante vers le Mont Zénévi ou direct au refuge Lancia. C’est encore le matin, la forme est là, le temps est parfait, le coin me plait… je choisis d’aller au Mont Zénévi (le chemin direct vers le refuge doit être celui indiqué en points noirs sur la carte).

Heureux choix, bon dieu ! Je m’élève sur un chemin en corniche où je croise encore quelques chamois. Puis, les premiers névés que je foule cette année, que du plaisir. Pierriers, herbe, névé… dans un paysage lunaire avec des abris de 14 en veux-tu, en voilà.

Nouveau croisement de chemin. Et là, apparemment, je me goure et je quitte le E5 pour le chemin indiqué "120" sur la carte. Heureux choix du destin, encore une fois !

Ce chemin superbe qu’il faut suivre avec attention, les marques rouge et blanche au sol sont souvent discrètes. Le sentier est peu marqué par moment et on a vite fait de le perdre.

Alors que je croyais être sur le E5, à un petit col dont je ne me souviens plus du nom, une pancarte indique que je suis à 10 minutes de la Sel. ta. Comando. Un coup d’œil à la carte et je comprends que j’ai shunté un gros bout du E5 et éviter le refuge Lancia qui ne peut être utile que pour ceux qui cherchent un hébergement.

 


Arco Romano

 

A l’Arco Romano (en contrebas d’une chapelle à la mémoire des combats du Monte Pasubio), je chope une route de guerre qui m’amène au refuge A. Papa (rien à voir avec le papa, c’est le nom d’un général…).

Refuge Papa, accroché comme un nid d’aigle avec le brouillard qui monte de la vallée… c’est un refuge de randonneurs plus ou moins expérimentés qui viennent dans le massif du Pasubio. Je m’y arrête pour un café, ambiance refuge et une armée de mitrons prépare la bouffe.

J’y laisse un petit mot dans le registre des gens de passage.

Le début de la descente par la voie de guerre (Strada degli Eroi) me plait bien avec le brouillard, les névés, les tunnels, les plaques en mémoire de ceux qui sont morts en ouvrant cette route… ambiance.

 

 

Après, c’est la routine des chemins qui n’en finissent pas de descendre. Je croise une colo de gosses qui montent et en bavent… ça ronchonne dans les rangs !

Plus loin, c’est un couple d’allemands qui me demande combien de temps encore pour le premier tunnel… un peu surpris quand je leur annonce encore une heure.

Arrivée à la Fugazze Pass. Une bière, un café, 2 croissants et le plein d’eau : c’est répéter la même tactique qu’hier, celle qui m’a porté chance.

Je décide de continuer, d’attaquer la montée et de m’arrêter dès que je trouve un coin sympa, en sachant très bien qu’il y aura au minimum 1h ½ de montée.

J’aime l’effort des montées à mon rythme.

J’arrive à la Selletta Nord Ouest en même temps que le brouillard, de gros nuages noirs et des grondements de tonnerre. Le vent souffle la brume qui monte à toute berzingue le long des parois… ambiance ! Mais rien pour la tente !

La Malga Boffetal n’a pas l’air de ressembler au petit refuge désert que j’espérais. Je le contourne et cherche un coin dans une cuvette avec des bosses et des vaches partout. Même une vipère que je taquine du bout de mon bâton et qui se dresse en position d’attaque.

Je pose le sac et cherche un coin… un petit truc merdique, au bord d’une piste. Mais basta pour ce soir.

Thé, je sors les affaires et j’ôte mes pompes.

 


Au loin, le Monte Cornetto. Le camp 22 était monté au pied.

 

J’ai bien fait de faire quelques pas pour voir où menait la piste : 100m plus loin, elle rejoint le E5 et un petit coin sympa n’attendait que moi, même une table en pierre ! Je déménage en bourrant tout n’importe comment, mes pompes et mon sachet plastique à la main…

19h50, fini de manger, le ciel s’est dégagé et je vais avoir droit à un festival de coucher de soleil sur le Monte Baffelano.