Jeudi 14 juillet.

On règle les affaires courantes : le MSR ne fonctionne pas terrible au kérosène (il charbonne un max), le bateau pour Kuumiut est plein (pas de place avant mardi ou bien un hypothétique privé pour demain matin). Balade dans la ville, chiquer du tabac suédois, fumer un Davidoff, tailler le bout de gras avec les Anders et Anders, manger des frites au grill, une patoche à la boulangerie, un café chez la marchande de cartes postales et, ce soir, regarder passer le banc de brume sur le fjord.

 


Le port d'Ammassalik.

 

Vendredi 15 juillet.

23h30 : sous la tente montée au fond du fjord de Tassilaq… et pour arriver là, une journée où tout s’est enchaîné à merveille et même plus !

8h45, au port d’Ammassalik. Tout se passe très rapidement et nous voilà sur un bon vieux rafiot bien sympa, celui qui était soi disant complet. Et nous voilà parti pour trois heures de voyage avec comme passagers une famille Inuit, un couple de danois avec leur fils qui est prof à Ammassalik et une jeune danoise (prof à Kuumiut) avec son bébé et ses parents.

Remonter le fjord et ses icebergs mais aujourd’hui on les admire sans effroi si ce n’est quelques coups de boutoirs quand le bateau en percute un petit.

 



L'arrivée à Kuumiut.

 

Petite sieste dans la cabine et on arrive à Kuumiut, dernier village avant Rien.

Pas grand-chose à voir avec Ammassalik : ici, c'est vraiment un village typique du Groenland et, en général, de l'Arctique. Des maisons dispersées et amarrées au socle rocheux, peu de monde dans les rues ou alors autour du magasin KNI, le point de ravitaillement, quincaillerie, vente de boissons et tabac... Des chiens attachés et vautrés dans la poussière avec dans le regard la promesse d'hivers rudes où ils sauront donner le meilleur d'eux mêmes. Des entassements pêle-mêle de traîneaux squelettiques, de skidoos, de filets de pêche, de morceaux de bâches et de bouts de corde en nylon. Des jouets en plastique déglingués trainant par ci par là, abandonnés par leurs propriétaires pas trop identifiés...

500 habitants dont la moitié des jeunes de moins de 18 ans et 14 profs dans leur école bien équipée.

 

 

Et c’est justement la jeune prof rencontrée sur le bateau qui nous trouve un pêcheur à béquille qui nous emmènera au fond du fjord de Tasiilaq pour 400 couronnes mais pas avant ce soir ou demain à cause de la marée. Elle nous propose de dormir à l’école si le départ était reporté au lendemain. En attendant, on monte nos sacs tout en haut du village et on va se casser une petite croute.

Le désir d’un petit dessert nous pousse vers le KNI qu’on atteint en déambulant entre les maisons, les chiens enchaînés, les névés et les carcasses de toutes sortes. Le pêcheur nous retrouve sur le port et nous propose un café chez lui. Passé le petit vestibule encombré de quartier de viandes, on entre dans la cuisine où sa femme nettoie une peau de phoque. Dans le salon coquet, 1 télé, 3 magnétoscopes, 3 chaînes, sa mère et ses enfants. On va rester là jusque vers 18h à regarder un film la télé… Wild Wind, une histoire de partisans yougoslaves ! Et une cassette filmée cet hiver : une partie de chasse en traineau.

 




Deux jeunes groenlandais, fan de heavy métal et Karl.

 

En attendant le départ, on fait la rencontre de deux jeunes descendus de nulle part, le sac rempli de bouteilles de jus d’orange et de vodka. Discussion laborieuse, photo de famille, échange d’adresse et au revoir ! Karl, le pêcheur nous appelle, c’est le départ. 40 minutes sur son bateau rapide à longer deux immenses icebergs et à filer au fond du fjord de Tasiilaq sur une mer d’huile laiteuse. Karl nous a laissés sur une petite plage, début du bout du monde.

 


Notre premier camp, au fond du fjord de Tasiilaq.


 

Samedi 16 juillet.

Journée de double portage.

On profite de la marée basse pour couper au plus court. Sensation étrange de se retrouver vers Overlord et dans le Weasel River de Baffin…

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La vallée de Tasiilaq est grandiose, plus de 2 km de large. Le camp de base est établi au milieu de blocs erratiques dont un magnifique, légèrement surplombant, qui nous sert de cachette pour nos réserves de bouffe.

Petit coin paradisiaque : herbe tendre, ruisseau à portée de main, vue splendide, pas d’autres bruits que les torrents… et d’innombrables moustiques !

Le MSR fonctionne au poil depuis qu’on a quitté Kuumiut.

Dimanche 17 juillet.

(20h15. Dans la tente au camp de bas, 11°à l’extérieur, 18° à l’intérieur)

Journée de l’ascension d’un sommet côté 1500m (durée 10h, dénivelé 1500m).

 

 

Départ à 7h45. Montée en rive gauche à travers blocs et prairies. On emprunte un névé jusqu’au petit col visible depuis le bas. On poursuit sur le glacier vers un col neigeux qui nous offre une vue incroyable sur le fjord parsemé d’icebergs et la banquise disloquée au large.

 

 

Un couloir pentu suivi d’un petit glacier parsemé de blocs précède une arête rocheuse pour nous emmener sur le plateau sommital où un petit lac laisse échapper une musique de cristal. Vue plongeante sur le Karole Glätscher.

 

 

Lundi 18 juillet.

17h45- Camp de base.

Le ciel est couvert et gris, un vent froid et intermittent souffle, la pâte gonfle bien au chaud dans la tente et les moustiques font chier. J’ai fait une connerie de ne pas avoir pris de tabac, je n’arrête pas de piquer dans mes vivres de course pour passer l’envie de fumer !

Journée oisive et de repos après les efforts de la veille. Photo de fleurs pendant l’après midi et balade jusqu’aux moraines descendant d’un glacier qui barre toute la vallée. Recherche vaine d’un passage pour gagner l’autre rive. Impressionnante gueule du glacier qui crache une eau grasse bien chargée de limons.

 


Une épilobe qui a bien du courage...