Sarek page 1

Parc national du Sarek

Laponie suédoise

(20 juillet au 2 août 1993)

Dimanche 25 juillet

21h45 11° 21100m

 

 Camp 4 : deux tentes adossées à un petit talus sur une plage perdue au milieu d’une moraine. En arrière plan, le mur du glacier blanc et bleu qui semble engendrer sa propre clarté dans un paysage tout noir. On est au milieu des nuages, du vent, de la pluie, du Sarek !

Toute la journée, on a progressé sur une vaste terrasse de la Kukkes complètement détrempée et battue par un véritable blizzard. Bonnet, gants, capuches et le vent dans le dos, on se tape nos 5h de marche pour installer le camp avec les premières gouttes.

 

 

Maintenant, il pleut ! On vient d’aller casser une petite croute dans la tente de Didier (tête de moine, coppa, ¼ d’oignon, quelques vesses de loup ramassées près des tentes et un petit café). Le temps de fumer une clop dehors et je suis bien imbibé !

Peut-être quelques pages de Rabbit Boss et dodo (… en espérant ne pas refaire cet espèce de rêve de la nuit dernière). La tente secoue dur et la pluie tambourine…

 


Camp 4

Lundi 26 juillet

10h40

Brouillard et petit crachin. Fort vent de S.E.

Plafond bas, très bas...

 

Pluie toute la nuit. Vers 8h, on profite d’une petite accalmie pour se faire un petit déjeuner dehors. Tout a la même couleur : gris/noir du sable et des blocs de la moraine, gris/noir du ciel, éclats blancs laiteux qui émergent du glacier, éclats blancs éblouissants des trainées dans le ciel, à l’horizon.

Repli dans le sac de couchage avec en bruit de fond, le torrent, le crépitement de la bruine gelée sur la toile de tente et le bruit de grand' voile de la tente qui claque au vent..

Petit bonbon à la menthe, en attendant des jours meilleurs ! On ne bougera pas de la journée !

 

Mardi 27 juillet

22h35

L’alti est hors circuit…

 

Camp 5.

On vient de sortir de la tente à Didier où on a mangé ensemble… ça veut tout dire…

Ce matin, pourtant, le vent avait d’étranges chevelures… en remontant la Kukkesvagge et il nous pris dans le dos, tout de suite à la sortie de notre petit abri au creux de la moraine. Des bourrasques à vous coucher à terre et à balayer de grésil la surface des névés : on pataugeait dans une bruine sifflante et acérée, les pas se faisaient rapides avec cette poussée phénoménale.

 


Quelque part, au pied du Niak

 

Mais ce n’était rien en comparaison de ce qui nous attendait au pied du Niak et sur ce lac que les bourrasques transformaient en mer démontée : vagues qui se fracassaient sur les plaques de glace, embruns soulevés et qui couraient vers nous à toute allure ne nous laissant que la possibilité de nous arcbouter au sol dans un monde où rien n’était immobile : ni la lumière, ni le ciel, ni l’air et le Niak qui jetait les feux du soleil.

 


Tempête sur le lac...

 

Un dernier névé avec son cortège de grésil et de bourrasques où il fallait faire le gros dos avant de passer le col dans une atmosphère unique de lumière mouvante et de pluie cinglante.

 


Couché par une bourrasque plus forte que les autres...

 

Descente vers la Ruoettesvagge qui nous est apparue comme une peau de félin noir parsemée d’ocelles blancs.

 


La Ruoettesvagge

 

Un immense troupeau de rennes (env. 200 bêtes) descendait la vallée accompagné d’une méchante pluie qui nous a alpagués et accompagnés jusqu’au lac où on a monté le camp 5, hallucinés, trempés et gelés…

Actuellement, bien au chaud dans le sac de couchage. Dehors le vent miaule et s’excite contre la tente…