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Le sentier européen E4 :

traversée de la Crète


Dimanche, 18 mai. Katsiveli à Irini

Dénivelé positif : 730m

Dénivelé négatif : 2075m

Durée : 10h

Gelée blanche sur les sacs, ce matin. Ça fait du bien une bonne petite caillante, de temps en temps. Bien couvert, on se met en route alors que le sommet du Pachnes est déjà dans le soleil.

 


Crocus sieberi (Crocus de Sieber)

 

C’est bon de commencer par une descente ! Rien d’autre à faire qu’à regarder se dérouler ses pieds et terminer sa nuit. L’esprit est en totale errance. Bride relâchée, il va où bon lui semble et moi, je le suis et assiste en spectateur à ses drôles de cheminements ou à ses longs silences. Un être éclaté, voilà ce que je suis. Chaque partie de mon corps, chacun de mes sens vit sa propre vie. L’esprit vagabonde à son gré. Mes yeux, mes oreilles, mon odorat batifolent en solo. Mes pieds trouvent leurs appuis sans que je ne les commande. Accompagné de mille générations de fantômes qui suivent la même route que moi, je marche dans leurs pas.
Je ne fais qu’un avec cette longue cohorte silencieuse de nomades qui ont foulé ce chemin avant moi. Ensemble, on trace notre route sans savoir où elle nous mène. Voir et aller plus loin encore. Surtout ne pas « arriver ». Arriver ça veut dire s’arrêter.
Connaissez-vous beaucoup de moments dans la vie de tous les jours où on parvient à un tel état d’esprit ? Il n’y a que là, sac au dos, qu’on peut se payer un tel luxe !
C’est pour ces moments rares et magiques que je marche. Et ce n’est pas tous les jours que ça arrive. Mais, aujourd’hui, ici, c’est arrivé !

 


Scilla nana (Scille naine)

On descend le long de vallées désertes, on franchit des cols, on longe des crêtes…


Un dernier col franchi à 2050m, et voilà que les gorges de Samaria se déchirent à nos pieds et filent vers la mer de Lybie.

Dernière longue descente pour tomber sur une piste (ça faisait longtemps !) qui monte jusqu’au refuge de Kallergi, refuge gardé dans la plus pure tradition des refuges du CAF : tu te déchausses pour entrer, tu avales un bol de soupe aux lentilles accompagné d’un mauvais vin. Mais tu es au paradis au-dessus duquel plane un couple d’aigles.

 

 

Encore une longue descente en lacets interminables pour arriver au plateau d’Omalos. (on a du louper le sentier quelque part…). Omalos où on pensait bien s’acheter une bonne bouteille pour fêter la fin des Levka Ori. Mais, il n’y a rien. On reprend le macadam. Un couple de belges s’arrête et nous prend en voiture jusqu’à l’entrée des gorges d’Irini. Cinq minutes de voiture pendant lesquelles on aura même eu droit à la recette des frites…

C’est pas magique des journées comme ça ?

On pose la tente en haut des gorges, au bord du torrent. Il pleut ce soir. Nos sacs sont au sec sous un abri sous roche. Et on termine la journée autour d’un feu de bois. Demain, on arrive à Soughia, au bord de la mer !

 

 

Lundi, 19 mai. Gorges d’Irini à Lissos

Dénivelé positif : 270m

Dénivelé négatif : 790m

Durée : 5h50

Descente des gorges d’Irini sous un ciel gris. Mais la lumière est belle, ce matin. Au niveau de la deuxième guérite de payage (oui, apparemment, on doit payer un droit de 2 euros pour descendre les gorges. Mais hier, tard, il n’y avait personne et ce matin, tôt, non plus !), on voit débouler sur notre gauche le sentier qui descend d’Omalos. Sentier qu’on aurait du prendre hier si le couple de belges ne nous avait pas emmené jusqu’en haut des gorges.

 

 

On rencontre de nombreux points d’eau durant la descente ainsi que des toilettes… le sentier est bien aménagé et la balade doit être sympa en pleine chaleur d’été.

 


Ranunculus asiaticus (Renoncule asiatique)

 

On termine le parcours sur une route jusque Soughia. Petit village touristique, au bord de la mer. On se paye un petit resto pour fêter l’évènement.

 

 

A l’ouest du village, un sentier mène à Lissos en 70 minutes. Belle remontée de petites gorges, traversée d’un plateau et descente sur le site de Lissos. Site archéologique majeur, en pleine nature, au fond d’une petite crique. Nous y arrivons à l’heure où les derniers promeneurs quittent l’endroit et on prend possession de notre nouveau camp. Deux belles chapelles, un temple et sa mosaïque, de nombreuses ruines… un plaisir à déambuler au milieu de l’histoire. Un point d’eau, une plage et quelques oliviers monstrueux complètent ce site qui ne laisse pas indifférent.

 

 

Je rencontre un jeune français à la recherche d’une géocache. On la déniche ensemble et je l’invite à notre tente pour un ouzo.

La nuit sera horrible, chaleur qu’on ne connaissait plus et la tente est envahie de moucherons piqueurs ! Je termine la nuit dehors.